Vins biologiques, biodynamiques et nature : c’est quoi ?
Tout le monde parle des vins biologiques, biodynamiques et nature en ce moment. Nous, on se trompe souvent dans leurs utilisations, et franchement, on n’aurait pas pu vous expliquer intelligemment la différence entre les trois. On s’est donc dit qu’on ne devait pas être les seuls ! On a alors rencontré Alex Campbell, un biologiste de formation qui est maintenant copropriétaire de la maison d’importation privée Deux Caves pour qu’il nous explique un peu mieux le tout.
Tastet : Avant tout, pourquoi votre entreprise s’appelle Deux Caves !? (rires)
Alex : “Honnêtement, c’est juste parce que quand mon partenaire Max Campbell (aucun lien de parenté, mais qui est un des sommeliers au restaurant Vin Papillon) et moi on a pensé faire ça, on se disait qu’on était juste deux caves de Montréal, qu’on n’allait jamais y arriver. Et finalement, Deux Caves, ben… c’est resté ! On travaille principalement avec la France, et disons que ça n’a pas le même impact là-bas. Ils la pogne pas vraiment…”
Tastet : Donc Alex, toi qui travailles juste avec des vins biologiques, vins biodynamiques et vins nature, peux-tu nous expliquer c’est quoi la différence entre les trois ?
Alex : “Un vin biologique est un vin qui est créé sans l’utilisation de produits chimiques et sans l’utilisation de produits synthétiques.”
Jusqu’en 2012, cette législation ne concernait que la viticulture (culture de la vigne), mais depuis, la règlementation a été modifiée et interdit l’usage de produits chimiques dans la vinification aussi (fabrication du vin). Le vigneron(ne) peut toutefois utiliser certains produits dans la viticulture et la vinification, mais seulement s’ils sont biologiques ou s’ils sont acceptés par le règlement — ce qui amène beaucoup de confusion. La vaste majorité des vigneron(ne)s qui font des vins biologiques n’utilisent pas de produits dans leur processus de création, mais l’opportunité d’en utiliser est là et donc plusieurs sont en désaccord et refusent de payer : ils font leurs vins avec la philosophie biologique, mais n’ont pas la certification officielle.
Tastet : “Les vins biologiques, c’est aussi la catégorie la plus large. Un vin biodynamique et un vin nature se doivent d’être biologiques, mais pas vice-versa.”
Alex : “Un vin biodynamique est un vin biologique, qui utilise la biodynamie.”
La biodynamie ne s’applique pas uniquement au vin, elle s’applique à toute l’agriculture. La biodynamie a été développée au 20e siècle, par l’Autrichien Rudolf Steiner. De l’étymologie grecque, le mot signifie “force de la vie” et vise à remettre de l’énergie à la plante avec un traitement différent. Très spéculative, péremptoire et un peu surréaliste, la méthode semble pourtant très bien fonctionner : beaucoup des plus grands vins du monde utilisent cette méthode. Pour Steiner, le mystère de la végétation vient d’un équilibre entre forces cosmiques venues des astres et forces terrestres montant du sol (eh oui…). Sa biologie tient compte des molécules organiques, de l’énergie et des minéraux. Abracadabrant, peut-être, mais les résultats sont là. Pour Steiner, l’agriculture est comme l’être humain : équilibré, régulé par un savant dosage entre ses éléments. L’Autrichien a même créé un livre de recettes pratiques très précises et plutôt étonnantes. Le compost de déchets est disposé en monticules, feuilleté en couches minces, saupoudré de calcaire. Depuis, plusieurs chercheurs ont testé et amélioré la formule exhaustive. Les vigneron(ne)s qui utilisent la biodynamie suivent donc plusieurs règles et suivent également un calendrier de plantation et de vendanges, qui respecte entre autres, le cycle lunaire, les astres, etc. La biodynamie n’utilise aucun produit chimique. “Je suis un scientifique de formation, je n’y croyais pas vraiment moi non plus, mais ça marche. Et les vigneron(ne)s qui utilisent cette technique ne reviendraient jamais en arrière,” raconte Alex.
Alex : “Un vin nature, c’est un vin biologique, où seulement un tout petit peu de souffre est ajouté : les vigneron(ne)s laissent le jus de raisin fermenter, that’s it!”
“Tout le monde essaie de faire du vin nature, mais c’est la technique la plus difficile à faire. Tu n’as aucune latitude sur ton vin. Sur tous les vins nature que je goûte, la moitié sont imbuvables!” (rires)
Donc, le vin nature n’a rien d’ajouté dans sa viniculture, et laisse seulement la possibilité d’ajouter peu de soufre lors de la vinification, principalement lors de la mise en bouteille. Les vins nature n’ont pas de certification officielle, mais les deux plus gros groupes sont les SAINS (sans aucun intrant et sulfite) et AVN (association des vigneron(ne)s nature).
“Tout est souvent mêlé parce que les gens pensent que c’est trop compliqué à expliquer, mais c’est pas si compliqué ! C’est assez simple même, et c’est mieux d’utiliser les bons termes au bon moment, principalement pour vous, les consommateurs. Beaucoup de gens ne prennent pas la peine de différencier tout ça, mais si on ne prend pas la peine de faire les choses comme il faut, on perd de l’importance du travail derrière le vin. On perd de vue les principes avec lesquels ces idées-là ont été pensées et le travail derrière les modes de production intelligents. L’intérêt pour moi n’est pas nécessairement de boire que des vins certifiés bio, biodynamiques ou nature, mais de retrouver ces vigneron(ne)s qui pratiquent une philosophie peu interventionniste et qui produisent des vins de qualité, des vins que j’aime boire.”
Merci Alex ! Pour plus d’informations sur la maison d’importation privée “deux caves“, visitez leur site web ou leur compte Instagram.
Écrit par Élise Tastet