Coulson Armstrong : gagnant de Top Chef Canada
Dans une ville qui déborde de talents en cuisine, Coulson Armstrong se démarque — non pas à coups de grandes déclarations ou d’effets tape-à-l’œil, mais par une maîtrise calme, une éthique de travail inébranlable et quelques-unes des plus belles assiettes de Toronto. Le chef vient tout juste de remporter Top Chef Canada.
L’histoire de Coulson ne commence pas avec de grandes ambitions, mais plutôt, et très justement, par la plonge. À sa dernière année du secondaire, le “nouveau” de la classe se fait offrir un poste dans un resto du coin pour laver la vaisselle. Puis vient la pâtisserie. « À partir de ce moment-là, je ne me suis plus jamais retourné », raconte-t-il. Ou presque. Un bref détour par la construction paysagère à 22 ans lui confirme ce qu’il savait déjà : sa place, c’est en cuisine.
Au restaurant Joia, quelqu’un lui suggère l’école de cuisine. Coulson s’inscrit au collège Humber, mais au bout de quelques mois, la cuisine le rappelle plus fort que n’importe quelle salle de classe. Le vrai terrain devient alors sa formation.
Un passage au Canoe — l’une des cuisines les plus emblématiques de Toronto — change tout. Coulson grimpe les échelons, finit par devenir chef de cuisine et fait de Canoe sa deuxième maison pendant quatre ans. À 32 ans, au lieu de se poser, il démissionne pour partir voyager : un périple de six mois qui se transforme en véritable masterclass sur les saveurs du monde et les cultures culinaires, et qui durera finalement trois ans.
Il travaille sur des plantations d’épices en Inde, étudie la cuisine de rue en Thaïlande et au Vietnam, puis s’installe en Australie, où il rencontre Morgan McGlone (qu’il surnomme « le Matty de l’hémisphère Sud »). En Nouvelle-Zélande, il cuisine un menu de 18 services en équipe de trois au restaurant Pasture. Il passe ensuite aux grills de NOMA à Copenhague, où il réalise que la ténacité canadienne — tête baissée, on fait le travail — est en fait une vraie fierté. En Californie, il approfondit l’approche farm-to-table chez State Bird Provisions, SingleThread et Mr. Jiu’s.
Malgré tous ces projets de haut niveau, Toronto continue de l’appeler. De retour au pays, il renoue avec Matty Matheson et devient une pièce maîtresse derrière le festival MattyFest, les projets de livres de cuisine et, éventuellement, l’ambitieux Prime Seafood Palace.
Évidemment, ouvrir un restaurant en pleine pandémie, c’est une autre forme de bootcamp. Retards de construction, casse-tête réglementaires, incertitude totale liée à la COVID repoussent l’ouverture de Prime de plus d’un an. Coulson reste flexible, prêtant main-forte à l’ouverture de Matty’s Patty’s et de Ca Phe Rang en attendant. Quand Prime ouvre enfin ses portes en 2022, l’impact est immédiat : un lieu à la fois discret et spectaculaire, imaginé par l’architecte Omar Gandhi, et un menu qui laisse vraiment la vedette aux produits — poissons, fruits de mer, viandes — sans artifices inutiles. Et petit fun fact : le mot “Palace” dans le nom est un clin d’œil au spectaculaire coin toilettes, une pièce cathédrale coiffée d’un puits de lumière de 22 pieds de haut.
Aujourd’hui, à titre de directeur culinaire chez Our House Hospitality et associé de Matheson’s Food Company, Coulson jongle entre haute cuisine et développement de produits — des épices et sauces BBQ aux nouveaux projets de mise en marché. Il est aussi impliqué dans un nouveau projet prévu à Hamilton d’ici la fin de l’année.
Après avoir parcouru le monde, Toronto reste son port d’attache — et son ambition demeure profondément ancrée dans la communauté. Que ce soit en dirigeant un « palace » de fruits de mer, en mettant en marché les mêmes légumes que ceux servis dans les assiettes du restaurant ou en rendant des produits dignes du Michelin accessibles aux cuisinier·ères à la maison, Coulson poursuit un objectif simple : construire des choses qui durent, qui comptent.
En 2025, Coulson participe à Top Chef Canada… et remporte la compétition! De plongeur à directeur culinaire, de l’Inde à Copenhague en passant par Queen West, le parcours de Coulson Armstrong est une leçon de passion, d’humilité et de constance. Dans un milieu qui aime le bruit, Coulson rappelle qu’en restauration — comme dans la vie — le vrai talent n’a pas besoin d’en faire trop : il se contente d’être bien fait. Et on ne pourrait pas être plus heureux pour lui; on a déjà hâte de voir la suite.
Écrit par Élise Tastet
Photographié par Taylor Renee Whyte