Lesley Chesterman : Pionnière d’hier, voix incontournable d’aujourd’hui

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Avant de devenir l’une des voix les plus redoutées — et les plus respectées — de la gastronomie montréalaise, Lesley Chesterman perfectionnait ses pliés et ses pirouettes. Danseuse de ballet de formation, elle quitte l’école après le secondaire pour poursuivre son rêve à temps plein… jusqu’à ce qu’une blessure au pied gauche — et une envie grandissante de liberté — la propulse vers une toute autre scène.

À l’époque, dans ses cours de danse, Lesley dissimulait des exemplaires de Gourmet Magazine. Premier indice qu’une autre passion l’appelait : celle de la cuisine.

Du ballet à la pâtisserie: l’exigence comme fil conducteur

Chez Lesley Chesterman, la cuisine coule dans les veines : sa mère et sa grand-mère étaient de véritables légendes derrière les fourneaux. En 1989, elle s’inscrit à l’ITHQ, aux côtés de futurs géants de la gastronomie comme Pasquale Vari, Martin Picard et Nancy Samson. Là, elle s’immerge dans le programme de pâtisserie — chocolaterie, confiserie, glacerie — avec la rigueur d’une danseuse professionnelle.

Très vite, elle retrouve dans la cuisine ce qu’elle aimait du ballet : discipline, précision, dépassement de soi. Un stage en France la mène auprès des plus grands, dont Yves Thuriès, Meilleur Ouvrier de France. Les cuisines sont rudes, surtout pour une femme. Mais Lesley trouve sa place — entre ganaches et génoises — et même l’amour, avec le chef-chocolatier Bertrand Bazin.

De retour à Montréal en pleine récession — une époque où, plaisante-t-elle, “tout était à louer”—, elle enchaîne les expériences entre La Gascogne et commence à enseigner à L’institut Culinaire Pius X, où elle transmet son savoir, notamment à un jeune Michele Forgione.

Lesley Chesterman: grande critique culinaire de Montreal Gazette

C’est en enseignant qu’elle se rapproche de l’écriture. Après avoir repéré des erreurs dans un article sur le chocolat, on l’encourage à proposer son propre sujet. Elle n’a pas de formation journalistique, mais possède ce qui ne s’enseigne pas : un palais fin, une plume vive et une opinion bien affûtée.

À la fin des années 1990, elle décroche le poste de critique gastronomique au Montreal Gazette, battant deux autres candidates. La scène culinaire n’allait plus jamais être la même : Lesley Chesterman écrit avec franchise, intelligence, et un humour parfois mordant. Adulée ou redoutée, elle ne laisse jamais indifférent — et surtout, ses papiers sont toujours savoureux à lire.

Pendant vingt ans, elle chronique “l’âge d’or” de la gastronomie montréalaise : les chefs en pleine éclosion, les ouvertures effervescentes, l’explosion du milieu, la gastronomie montréalaise. Dans une ville où la nourriture est presque sacrée, Lesley devient une figure de confiance reconnue. Parmi ses anecdotes cultes : des virées avec Anthony Bourdain à L’Express et au Pied de Cochon, des éclats de rire mémorables avec Jacques Pépin.

Nouvelle vie, même passion pour Lesley Chesterman 

Après une séparation en 2011, elle retrouve l’amour avec Jean Aubry, critique de vins au Devoir, et se lance dans une carrière bilingue. Elle quitte la Gazette pour voler de ses propres ailes : publications de livres, chroniques radio, conférences — Lesley Chesterman multiplie les projets, toujours fidèle à sa passion : raconter la vraie cuisine, celle qui se vit et se partage.

Avec quatre livres à son actif (et un cinquième en préparation), elle continue de défendre une vision authentique et éclairée de la gastronomie.

Une voix plus pertinente que jamais

À l’heure où tout le monde se proclame critique et où les influenceurs saturent les réseaux sociaux, la voix de Lesley Chesterman sonne comme une bouffée d’air frais. Solide, informée, vive d’esprit, elle continue d’élever le débat. Aujourd’hui présidente du prestigieux jury de l’Est du Canada pour les World’s 50 Best Restaurants dans la section de l’Est du Canada, elle veille à ce que notre scène culinaire ait la visibilité qu’elle mérite.

Et parce qu’une bonne nouvelle ne vient jamais seule : Lesley vient de lancer SALT LICK, un podcast explosif coanimé avec le chef coloré David McMillan. Présenté comme un duel amical-animé entre Chef et Critique, Homme d’opinion et Femme d’opinion, le balado promet des débats passionnés, des désaccords et une passion commune pour la gastronomie sous toutes ses formes. Après plus de trente ans d’amitié, de rivalité et de respect mutuel, Lesley et David lèvent aujourd’hui le voile sur leurs échanges, invitant les auditeurs à entrer dans leur univers passionnant.

La suite ?

Un déménagement en France, peut-être des poules à élever… (rires) Mais une chose est sûre : que ce soit en chronique, en livre, en podcast ou à table, Lesley Chesterman continuera de défendre haut et fort la gastronomie montréalaise — et québécoise.

Femme de tête, de cœur et de parole franche, elle est — et restera — l’une des grandes voix de notre culture culinaire.


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