Nancy Samson : chocolatière d’exception à Trois-Rivières

Nancy Samson chocolatière Trois-Rivières ambassadrice de l'érable

Nancy Samson — Saviez-vous que les grand(e)s chef(fe)s de chez nous utilisent souvent l’érable à l’année ?! En effet, dans un souci de rester local et d’utiliser les produits extraordinaires du Québec tout en respectant l’environnement, le sirop d’érable remplace bien souvent le sucre sur les grandes tables de chez nous. Voici une série de portraits des supers ambassadeurs culinaires de l’érable du Québec

« J’étais souvent dans la cuisine avec ma mère, je cuisinais beaucoup avec elle. J’ai toujours été intéressée par les sucreries et la pâtisserie, et adoré les techniques du chocolat. J’aime l’apprentissage et le côté créatif. Je suis toujours en admiration avec le fait qu’avec le chocolat, on part d’un produit liquide et qu’on peut l’amener à quelque chose d’aussi extraordinaire ! »

Même si les techniques ont toujours passionné Nancy, enfant, elle ne réussit pas très bien à l’école. « Je n’étais pas très bonne à l’école et mon frère, qui a un an et demi de différence avec moi, était très bon. On nous a toujours comparés et c’était toujours moi qui étais la moins bonne ; ce n’était pas très motivant. »

En secondaire cinq, un chef vient présenter le programme de formation d’école d’hôtellerie de Trois-Rivières. « Ç’a été une révélation. » Il y avait très peu d’écoles de professionnels de la restauration à l’époque et Nancy décide immédiatement qu’elle veut s’enligner vers l’école hôtelière de Trois-Rivières. « J’ai commencé en formation générale de cuisine, mais je n’aimais pas vraiment les poissons et la viande. Je me suis donc inscrite à l’ITHQ en pâtisserie. L’ITHQ était une des seules écoles à donner un cours de pâtisserie et j’ai décidé de prendre cette voie — ç’a été super. J’ai eu d’excellents profs et j’en garde un très bon souvenir. » Pendant qu’elle est à l’école, Nancy travaille à l’hôtel de l’ITHQ simultanément pour gagner un peu d’argent de poche. Elle y rencontre Normand Laprise, travaille avec Martin Picard qui étudie en même temps qu’elle et Thierry Daraize, qui est alors chef de l’hôtel les fins de semaine. « L’énergie était trop cool etl’atmosphère de l’hôtel était vivante ; c’était une belle époque ! »

Nancy quitte ensuite pour aller travailler dans les Laurentides où elle travaille à la Réserve avec Jean-Jacques Morand. Elle comprend cependant assez rapidement qu’il lui manque encore beaucoup de connaissances. Elle décide donc de s’inscrire au cours de chocolaterie de l’ITHQ. Le groupe n’accepte que 50 élèves qui y apprennent la confection de glaces, de bonbons, d’oranges confites, etc. — le programme est si spécialisé qu’il n’existe que pendant trois ans. « C’était très protocolaire, ils venaient de rentrer les costumes à l’ITHQ. La rigueur du métier, qui s’est d’ailleurs beaucoup perdue, était très importante. On avait des cours de confiserie extraordinaires ! Dans ce cours, on était une gangde marginaux. J’y ai d’ailleurs rencontré Lesley Chesterman, elle était dans ma classe ! On a été les premiers à avoir un local rénové, les premiers à grafigner le marbre et le granite. J’y ai connu des gens exceptionnels et j’y ai eu de très bons profs. J’en garde aussi un excellent souvenir. »

Une fois ses études terminées, Nancy travaille à l’hôtel Delta, puis au restaurant Citrus sous la direction de Monsieur Beausoleil et de Normand Laprise. Elle passe ensuite quelque temps au Van Houtte, car l’hôtel de l’ITHQ fermait ses portes les fins de semaine. Elle décide cependant rapidement de quitter pour l’Ouest canadien afin d’apprendre l’anglais. Nancy commence alors à travailler au Jasper Park Lodge. Là, elle comprend rapidement qu’il y a un grand intérêt pour sa formation de chocolatière.

À son retour de l’Ouest canadien, elle apprend que l’école d’hôtellerie de Trois-Rivières maintenant appelé Bel Avenircherche un enseignant pédagogue avec de bonnes connaissances et pas trop d’expérience. Étant une des seules à avoir suivi ce cours de chocolaterie et à avoir étudié à l’extérieur du Québec, Nancy sent qu’elle pourrait peut-être enseigner la pâtisserie. Elle postule et est acceptée ; à 20 ans, Nancy commence ainsi à enseigner la pâtisserie et la chocolaterie (!) « J’ai toujours pensé que c’était important de bien comprendre le produit avant de le travailler. L’éducation est primordiale, c’était donc un honneur pour moi de pouvoir faire ça. Ça fait maintenant 30 ans que j’enseigne le chocolat ! »

Afin de ne pas perdre ses techniques chocolatières, Nancy commence simultanément un atelier de chocolaterie dans son sous-sol. « Mon proprio m’a donné la permission : je me suis acheté une tempéreuse et j’ai commencé à faire du chocolat. Comme les « Madames Tupperware », j’ai commencé à offrir des démonstrations dans les maisons, des ateliers de 10-12 personnes et des conférences. »

Nancy emprunte ensuite 10 000 $ et améliore sa fabrication de chocolat pour les entreprises. « Je fournissais l’Auberge Godefroy, la pâtisserie Mado à Trois-Rivières et beaucoup de chocolateries. C’était mes chocolats, mais toujours sous un autre nom. »

Et puis, un jour, Nancy reçoit un appel des boulangeries Première Moisson. Elle les rencontre et obtient le mandat. Nancy commence à fournir en chocolat sept boulangeries et termine avec 17 magasins. Pour une jeune chocolatière, le défi est de taille, mais Nancy se révèle une travailleuse acharnée qui apprend très rapidement. « Cette expérience m’a appris la rigueur. Ç’a été la plus belle école. J’y ai aussi appris le volume et la standardisation. Grâce à eux, j’ai appris à ne plus paniquer devant un problème ou une production à fournir. C’était rôdé au peigne. J’ai aussi beaucoup de respect pour tous les livreurs de la planète. Je me souviens d’une de mes premières livraisons, il faisait -20 degrés et quand je suis arrivée au troisième magasin de ma tournée à Dorion et que j’ai ouvert le camion, toutes les poules en chocolat avaient craqué. J’ai voulu mourir. »

Cependant, Nancy est alors nouvelle dans la business, elle ne pense pas à négocier son contrat de manière à réajuster les prix selon la demande. « Plus ça grossissait, moins je faisais d’argent. Ma santé en a pris un coup et j’ai dû subir une opération importante. J’ai frappé un mur et j’ai complètement arrêté de travailler. J’ai pleuré pendant un an. Tous les jours, je regardais mon équipement de chocolaterie dans le sous-sol et je me disais que ça ne pouvait pas finir comme ça. »

Nancy voit plusieurs chocolatiers gagner en popularité et ne comprend pas pourquoi elle n’y arrive pas. Elle part alors se reposer un peu aux Bahamas. À son retour, elle recommence tranquillement à enseigner et elle apprend qu’un salon de coiffure situé dans une ancienne Banque de 1920 à Trois-Rivières est à vendre. À l’époque, le salon se trouve dans un coin peu visité, mais Nancy y voit un potentiel. « C’était un bâtiment historique, et je crois beaucoup aux énergies. J’adorais la bâtisse et je savais que si je me lançais en affaire, je souhaitais habiter au-dessus de la chocolaterie. C’était cher, mais l’endroit avait de l’âme et en vendant notre triplex, on a réussi à acheter la bâtisse. »

Par contre, une fois cette belle bâtisse achetée, Nancy et son conjoint se trouvent confrontés à tous les problèmes de propriétaires : problèmes de planchers, de douches, etc. Rapidement, ils dépassent leur objectif de projet de 80 000 $ puisés dans leur argent personnel. « J’étais tellement stressée. Pour l’ouverture, on a fait une conférence de presse et on a invité tous les médias que je connaissais. Cacao Barry a donné plus de 100 kilos de chocolat, Nespresso a commandité les cafés et tout le monde en a parlé ! Je me suis sentie appuyée et j’ai eu espoir que ça fonctionnerait. »

Pour s’assurer de toujours rester au fait des dernières tendances de chocolats et des notions les plus pointues en chocolaterie, Nancy fait plusieurs stages dans de grandes maisons. « C’est certain que c’est plus difficile d’apprendre de nouvelles techniques et faire des stages à 49 ans qu’à 20 ans, mais maintenant, avec près de 30 ans d’expérience, je suis capable d’en prendre et d’endurer des conditions difficiles. J’ai développé mon caractère. Je pense que si j’avais fait ces stages à 20 ans, avec le caractère que j’avais, ça n’aurait malheureusement pas fonctionné ! » (Rires.)

Tous les ans, à son retour de stage, Nancy raffine sa marque et pense à de nouvelles gammes de produits « J’essaie d’avoir des choses que les autres n’ont pas, de me démarquer. J’aimerais même un jour peut-être développer des franchises ! »

Cette femme passionnée et touchante ne s’est jamais laissée abattre et a toujours foncé. Elle a mis tout son cœur dans le projet auquel elle croyait et elle a vu juste. « J’aime faire des projets qui touchent. J’aime le côté créatif de l’entrepreneuriat. Je suis fière d’avoir relevé le défi et d’avoir ouvert ma chocolaterie en région ! Tout le monde disait qu’à Trois-Rivières, il n’y avait rien. Que j’allais mourir dans mon sous-sol. C’est un énorme accomplissement. Aujourd’hui, je ne dois rien et je n’ai rien volé à personne. Je suis tellement fière que maintenant les gens de Trois-Rivières me supportent et m’encouragent et j’ai une équipe extraordinaire pour que ça dure. J’ai construit mon rêve et je suis pas mal fière de ça ! »

Longue vie à ta chocolaterie Nancy et vive l’entrepreneuriat !

Petit questionnaire pour Nancy Samson

  • Que serais-tu si tu n’étais pas chocolatière ? Journaliste à la radio ou animatrice ! J’aime ça parler toute seule. (Rires.)
  • Si tu pouvais habiter n’importe où dans le monde à part Trois-Rivières, ce serait où ? À Paris, j’habiterais là, je m’enlignerais là. Et aux Îles-de-la-Madeleine. Moitié, moitié.
  • Quel est ton chocolat préféré ? Le Chocolat au thé rouge, basilic et j’ai vraiment un faible pour le chocolat de Tanzanie. Pour la glace, j’adore le sorbet coco et la glace à l’érable.

Petit questionnaire sur l’érable pour Nancy Samson

  • Comment préfères-tu travailler l’érable ? Dans la crème glacée, la glace à l’érable !
  • À quand ton premier souvenir de l’érable ? Quand j’étais jeune, avoir les mains qui nous collent sur la chaudière d’eau d’érable. On a toujours eu une terre à bois, mais ma sœur l’a rachetée et en a fait une érablière. J’ai de merveilleux souvenirs du cheval qui traîne les seaux d’érable. C’est la plus belle matière.
  • Comment le retrouve-t-on dans ta boutique ? Dans la tablette à 90 % de pure pâte de cacao et 10 % de sucre granulé d’érable, un de nos nouveaux produits !
  • Comment savoures-tu l’érable à la maison ? Dans le yogourt, en vinaigrette, et dans des galettes de sarrasin quand j’ai le temps d’en faire.


Photographié par Érable du Québec

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