Femmes en affaires en 2020+ ça veut dire quoi ?

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Les femmes en affaires, elles sont où ? Eh bien, il faut les chercher ! L’entrepreneuriat effectue un retour au Canada : 44 700 Canadiennes et Canadiens ont démarré une entreprise en 2018, soit le nombre le plus élevé en une décennie. Il y a maintenant plus de 1,1 million de petites et moyennes entreprises (PME) au Canada et elles comptent pour 90 % de tous les emplois du secteur privé, emploient 10,7 millions de Canadiennes et Canadiens et contribuent à plus de 1 billion de dollars au PIB.

Si vous ne le saviez pas, Tastet est une entreprise dont les propriétaires sont majoritairement des femmes. Nous sommes également une entreprise appuyée par Femmessor et la fondatrice a été reconnue comme une des cinq femmes entrepreneures coup de cœur de Montréal Inc. Récemment, on a reçu le commentaire que c’était vraiment « fatigant ces histoires de femmes, de toujours les séparer des hommes », et le commentaire nous a frappé. On a compris qu’on devait écrire un article pour faire remarquer l’invisibilité des femmes et l’anormalité des affaires puisqu’il semblerait que ce ne soit pas encore assez clair que la réalité des femmes en affaires est beaucoup plus difficile que celle des hommes. Il est utopique de penser que nous vivons dans une société d’affaires égalitaire. On a beaucoup, beaucoup de chemin à faire.

Le magazine L’Actualité publiait un article fort intéressant où il avouait très franchement avoir honte (bravo) d’avoir sorti un palmarès de 20 PME québécoises connaissant une expansion spectaculaire et dans lequel figurait une seule entreprise. Une seule !

L’article montrait entre autres que ce palmarès masculin à 95 % était le reflet d’une réalité plus profonde. Les femmes qui se lancent en affaires doivent non seulement affronter les obstacles normaux du milieu des affaires, mais des obstacles encore plus difficiles à franchir que ceux qui attendent les hommes.

« Seulement 16 % des PME canadiennes appartiennent majoritairement à des femmes, et ces PME font montre, dans l’ensemble, d’une croissance plus lente que celles appartenant à des hommes. C’est notamment le manque de ressources financières qui est en cause. Selon de récents rapports d’organismes publics et de la Banque Royale du Canada, les entrepreneures ont plus difficilement accès au crédit et aux capitaux que leurs homologues masculins, problème qui constitue un frein majeur à l’expansion de leurs entreprises.

Dans un portrait de l’entrepreneuriat féminin publié en 2010 par le ministère canadien de l’Industrie, on apprend que les femmes chefs d’entreprise se voient plus souvent refuser un prêt que les hommes. (En 2007, le taux d’approbation pour du financement par cartes ou marges de crédit, par exemple, était de 77 % pour les PME appartenant à des femmes, con­tre 94 % pour celles appartenant à des hommes.) Dans le cadre de leur demande de prêt, elles doi­vent aussi fournir une documentation plus complète que ce qu’on exige de leurs confrères. Et les sommes qu’elles obtiennent sont beaucoup plus modestes : en 2007, le prêt moyen accordé aux PME des femmes était presque 2,5 fois plus faible que celui consenti aux PME des hommes. »

Supposément, ce déséquilibre aurait un lien avec le type d’entreprises que les femmes choisissent de créer : de plus petites entreprises (avec moins d’employés et d’actifs) et dans des secteurs à plus haut risque (commerce de gros, commerce de détail, services professionnels, soins de santé, arts, divertissement, tourisme, hébergement, alimentation, etc.) Ces caractéristiques expliqueraient en partie pourquoi les institutions financières se montrent plus réticentes à donner du financement.

Nous on le dit haut et fort : BULLSHIT ! Être femme en affaires, ça veut dire se faire dire qu’on ne peut pas trop déranger, qu’il faut réussir, mais pas trop et qu’on doit faire attention à ce dont on a l’air plutôt qu’à nos idées. Être femme en affaires, ça veut dire travailler plus fort que les hommes qui font la même chose à côté de nous et se faire constamment demander qui est “l’homme” derrière le projet. C’est insultant.

Les entrepreneures subissent de la discrimination sur la seule base de leur sexe. L’article de L’actualité met également en lumière des récents travaux universitaires sur les start-ups. Celles qui sont dirigées par des femmes sont moins susceptibles d’attirer des investisseurs, simplement parce qu’elles sont dirigées par des femmes. Eh oui.

« Alison Wood Brooks, professeure à la Harvard Business School, et ses collègues ont publié une étude fort révélatrice à ce sujet dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences, en mars 2014. Les chercheuses ont d’abord remarqué que dans les concours d’entrepreneuriat, aux États-Unis — des activités publiques où des entrepreneurs ont cinq minutes pour convaincre des investisseurs d’injecter des fonds dans leur projet —, les concurrents masculins ont 60 % plus de chances d’obtenir du financement que les concurrentes féminines. Mais comment savoir si les hommes qui participent à ces compétitions ne sont pas tout simplement plus qualifiés et leurs propositions objectivement plus intéressantes ?

Pour en avoir le cœur net, les auteures ont conçu une ingénieuse expérience. Elles ont montré à des volontaires la vidéo d’une présentation d’affaires, où l’on voyait défiler des images tandis que l’entrepreneur décrivait son projet en voix hors champ, sans toutefois se montrer. Tous les participants ont vu les mêmes images et entendu le même texte, à un détail près : dans certains cas, la vidéo était narrée par une voix d’homme, dans d’autres, par une voix de femme. Résultat : les sujets se sont dits plus désireux d’investir lorsque le projet était présenté par une voix masculine que lorsque le projet (le même !) était narré par une voix féminine. Et ils trouvaient la proposition plus « persuasive », « factuelle » et « logique » si c’était un homme qui parlait plutôt qu’une femme. » (L’Actualité)

Dégoûtant.

À toutes les embûches de l’entreprenariat, il faut ajouter aux femmes le manque de réseaux d’entraide et la rareté de mentors et de modèles inspirants pour les femmes, notamment dans les médias, qui pourraient faire naître chez celles-ci l’envie de se lancer en affaires. Les jeunes femmes se reconnaîtront davantage dans des femmes d’affaires qui ont réussi que dans des hommes. Ça peut contribuer à éveiller des envies de carrière chez les jeunes filles et permettre aux femmes de s’imaginer devenir des chefs de file de la croissance !

Sur des notes positives, à l’heure actuelle, on estime qu’au Québec environ 28 % de tous les entrepreneurs sont des femmes, comparativement à seulement 11 % il y a 40 ans. En 2018, il y avait 241 000 femmes entrepreneurs au Canada, en hausse par rapport à 49 000 en 1976. Si la tendance actuelle se maintient, le nombre de nouveaux entrepreneurs devrait être égal entre les hommes et les femmes en 2030. Au cours des 40 dernières années, le nombre de femmes entrepreneures a augmenté 3,1 fois plus rapidement que le nombre d’hommes entrepreneurs !

En 2011, la contribution économique globale des PME dirigées par des femmes se chiffrait à environ 148 milliards de dollars. Une augmentation de 10 % du nombre d’entreprises dans lesquelles des femmes détiennent une participation majoritaire au cours des 10 prochaines années pourrait faire grimper leur contribution économique à environ 198 milliards de dollars (compte tenu de l’inflation, ce gain s’élèverait à environ 163 milliards de dollars, soit un bond annuel net de 15 milliards de dollars) ! Il existe d’autres avantages considérables liés à la multiplication des femmes entrepreneures dans le secteur des PME au Canada, dans la mesure où l’augmentation du rendement de leur entreprise renforcerait leur contribution économique attendue.

Alors qu’est-ce qu’on fait ? On donne la chance aux femmes. On arrête de juger leur look et vouloir les mettre dans des rôles secondaires et on juge plutôt leurs idées et leurs actions en les aidant à aller dans des positions de pouvoir.

Il faut augmenter la présence de modèles de femmes entrepreneures de toutes les régions, tous les secteurs d’activité et toutes les tailles d’entreprise ! Il faut promouvoir les femmes dans tous les réseaux d’entrepreneurs possibles et surtout mettre en contact des femmes d’affaires avec des jeunes femmes, particulièrement dans les milieux scolaires pour qu’elles aussi puissent rêver et travailler à devenir des femmes d’affaires. Il faut faire comprendre aux filles le langage business et les aider à se positionner de manière aussi forte que les gars.

Les femmes en affaires font avancer l’égalité des sexes et aident à construire des écosystèmes entrepreneuriaux plus égalitaires. Elles doivent être célébrées ! Nous on dit oui aux femmes en affaires et oui aux entreprises gérées et opérées par des femmes ou qui leur appartiennent. On s’autoproclame « féministes d’affaires » : longue vie aux femmes d’affaires !

Sources :

Merci infiniment au Réseau des femmes d’Affaires du Québec, à la Caisse de dépôt et de placement du Québec, à la BDC, à Montréal Inc. et à Femmessor pour leur aide dans la préparation de cet article.


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